En raison de leur apparence détaillée et le contraste frappant de leur écorce avec leur environnement des conifères, le bouleau est un arbre plein de charmes pour le peintre comme pour le marcheur. Le souci de rendre dans mes compositions les caractéristiques de chaque essence demande un travail d’observation dans la nature. Je consulte des clefs d’identification des arbres, cherchant l’exactitude technique dans ces livres pour rendre les contrastes, les textures, la forme générale de la stature, la ramification des branches selon l’essence des arbres. Afin d’en donner une représentation réussie, je fais des esquisses puis je peins avec un certain réalisme, sans trop entrer dans les détails, directement sur le support pour ne pas refroidir l’atmosphère souhaitée de l’arbre qui s’enracine dans le paysage.
Les Bouleaux blancs aiment pousser en groupe, se supportant les uns les autres par leurs racines. C’est une essence pionnière qui a besoin d’énormément de lumière. Écologiquement souple, on le rencontre aussi en forêt mixte et en milieu humide. Chez les jeunes tiges, l’écorce est brun-rouge, devenant luisante, blanche plus tard avec des teintes de beige ou rose, se détachant facilement en bandes horizontale.[1] Connus pour leur écorce blanche et leur stature étroite, les bouleaux blancs sont élégants et ajoutent un bel impact à n’importe quel paysage. Leur écorce tachetée de lenticelles foncées et saillantes forme des motifs intéressants, des figures, selon notre imagination.
Peu performant en ville, il résiste difficilement aux différents stress urbains. Ce choix de plantation est rarement fait par les municipalités, car il s’avère être un mauvais investissement compte tenu de son espérance de vie limitée en milieux urbains. L’activité humaine génère beaucoup de pollution atmosphérique et chaleur. Bien que ces facteurs soient très dommageables pour la santé humaine et animale, ils sont aussi très nuisibles au développement des arbres. Bref, les bouleaux présents en ville dans de rares écosystèmes, ou plantés en talle par des citadins doivent, composer avec des conditions ne ressemblant en rien à leur forêt d’origine.
Les bouleaux sont un élément important de la forêt laurentienne, et de toutes les régions froides de l’hémisphère boréal, qui avec le réchauffement climatique, devront probablement retraiter vers le nord. Le nom générique Betula est d’origine du mot celtique betu, qui signifie l’arbre qui reluit, une allusion à l’écorce blanche qui caractérise certaines espèces. La nuit, son écorce éclaire la forêt.[2]
Voici les six espèces indigènes du genre Betula, selon la Flore laurentienne du Frère Marie-Victorin :
- Betula alleghsniensis Britton – Bouleau jaune – merisier – (Yellow Birch);
- Betula glandulosa Michx – Bouleau glanduleux – (Glandular Birch);
- Betula lental L. – Bouleau flexible – Merisier rouge – (Cherry Birch);
- Betula papyrifera Marsh – Bouleau à papier – Bouleau blanc – (Canoe Birch);
- Betula populifolia Marsh – Bouleau à feuille de Peuplier – Bouleau rouge – (Old field Birch) ;
- Betula pumila L. – Bouleau nain – (Dwarf Birch).[3]
Au Québec, on appelle à tort deux espèces de bouleau « merisier » (B. alleghaniensis) et « merisier rouge » (B. lenta). L’erreur vient du début de la colonisation lorsque, cherchant à identifier les espèces botaniques qui poussaient sur ce nouveau continent, nos ancêtres auraient été confondus par une certaine similitude entre la forme de la feuille du bouleau jaune et celle d’un merisier européen (Prunus avium).
Toutes les espèces de Bouleaux n’ont pas l’écorce blanche mais la majorité présente une fine texture qui évoque une mince couche de papier. La rapide croissance du bouleau à papier, la beauté de son écorce blanc argenté; sa durée de vie est de 100 à 150 ans alors que le bouleau jaune peut atteindre 250 ans. Le Bouleau jaune, le plus grand bouleau de l’est du Canada, se fond dans la forêt environnante, alors que le bouleau blanc est une espèce pionnière amoureuse de la lumière.
Le noble Bouleau jaune a été choisi en novembre 1993 comme arbre emblématique du Québec. Outre sa légèreté, son élégance, le Bouleau jaune est facile à reconnaître avec l’écorce de son tronc jaune doré luisant se détachant en feuillets minces et frisées devenant des plaques plus foncées et grisâtres, avec l’âge. [1]
Selon un reportage de Radio-Canada en 2003, le plus gros bouleau jaune du Québec, peut-être même du Canada, se trouve au Lac-St-Jean, à une trentaine de kilomètres de la municipalité de Lamarche. Sa circonférence est de 5,2 mètres à hauteur de poitrine. Pour donner une idée de la taille peu commune de ce bouleau jaune, disons qu’il faut au moins six personnes pour en faire le tour. L’arbre remarquable, qui a échappé à la coupe forestière et aux catastrophes naturelles, aurait entre 250 et 300 ans.[4]
Les canots d’écorces Amérindiens sont fabriqués avec l’écorce interne, rouge-orangé, du bouleau à papier. L’écorce de bouleau est lisse, dure, légère, résistante et imperméable. Comparativement à l’écorce d’autres arbres, celle du bouleau constitue une matière supérieure pour la fabrication du canot, puisqu’elle s’enroule autour du tronc plutôt que de le parcourir sur la longueur, ce qui fait en sorte qu’elle est plus malléable.[5]
La construction de ces canots d’écorce impliquait l’utilisation de nombreuses essences que les Amérindiens vénéraient: la charpente du canot était construite en thuya, puis recouverte d’écorce renversée de bouleau, elle-même cousue à l’aide des plus fines racines de mélèze. Les autochtones utilisaient ensuite la gomme de pin ou de sapin qu’ils avaient récoltée, bouillie, mélangée à du suif pour étancher leur embarcation. [6]
J’imagine que le canot de Chasse-Galerie, la légende préférée des voyageurs, est bien d’écorce de bouleau. (Celui du pacte avec Satan, dans lequel ce dernier promet de ramener les voyageurs chez eux en six heures).
Les amérindiens se servaient de l’écorce de bouleau pour de multiples usages médicinaux et une foule d’objets utilitaires. Ils ont su aussi profiter de l’eau printanière de bouleau en cure pour purifier l’organisme. (À consommer le matin à jeun pendant environ deux semaines)[7]
Dans les régions où l’eau d’érable n’était pas disponible, les amérindiens fabriquaient du sirop avec la sève de bouleau. Ce sirop,qui ressemble à de la mélasse, demande 130 à 140 litre d’eau de bouleau pour donner 1 litre de sirop comparativement pour l’eau de l’érable, le ratio est de 30 à 40 pour un.[8]
Dans la nature, la mort et la putréfaction sont porteuses d’une nouvelle vie. Des champignons ont infesté et réduit lentement le bois de cœur (duramen) de ce bouleau jaune, ce qui fait que le tronc a fini par devenir creux, l’arbre affaibli s’est rompu et est tombé. Notre bouleau jaune renversé par un bon vent, est couché, il pourrit…L’arbre est envahi par des termites du bois humide, des fourmis charpentières, des mites et des collemboles. Il continue de nourrir et de soutenir une multitude d’être vivants. Ces insectes, maillon essentiel dans la chaîne des organismes vivants, constituent une bonne partie de la nourriture des pics et des ours grizzlys. Des champignons et des bactéries contribuent à la décomposition des fibres de son bois et près du tiers sera transformé en humus où de nouvelles semences vont germer.[9]
Références :
- Smith, Jean et Parrot, Louis, Arbres, arbustes et arbrisseaux du Québec, Les publications du Québec, 1984, 158p.
- Beaudoin, Marie-Fleurette, Les arbres remarquables du Jardin botanique de Montréal, Québec, Édition du Trécarré, 1990, 186p.
- Frère Marie-Victorin, É.C., Flore laurentienne, Troisième édition, mise à jour octobre 1995, Gaétan Morin Éditeur, 1092 p.
- https://ici.radiocanada.ca/actualite/semaineverte/ColorSection/Foresterie/030831/bouleau.shtml
- http://www.encyclopediecanadienne.ca/fr/article/canot-decorce-de-bouleau/
- Hardy, Suzanne, Nos champions, les arbres remarquables de la capitale, Québec. Éditions Berger, 2009,224p
- http://de-tout-un-peu.skynetblogs.be/archive/2006/03/26/cure-d-eau-de-bouleau-de-printemps.html
- https://www.lesoleil.com/affaires/le-sirop-de-bouleau-vaut-son-pesant-dor-e4a7d492c5f5887dd057310b63843cb2
- Suzuki, David, L’arbre: Une vie, traduit de l’anglais par Dominique Fortier, Canada, Les Éditions du Boréal, 2005, 258p.
Titre de la bétulaie: « Dames des bois », 2017, triptyque d’aquarelle sur toile, 3 (7’’X 5’’)
Le dessin au crayon de plomb du canot amérindien a été inspiré du tableau de N.C. Wyeth, 1907, The Indian in his solitude.